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Frédéric Bazille
1841-1870

Le catalogue raisonné numérique

par Michel Schulman
© Musée d'Orsay, Paris

Forêt de Fontainebleau

1865
Huile sur toile
59 x 73 cm - 23 5/8 x 28 3/4 in.
Paris, Musée d'Orsay, France - Inv. RF 2721
Dernière mise à jour : 08-06-2022
Référence : MSb-13

Historique

Don du peintre à Fantin-Latour - Don de Mme Fantin-Latour au musée du Luxembourg, 1905 - Attribué au musée du Louvre-Galerie du Jeu de Paume le 5 janvier 1929 (RF 2721) - Entré au Jeu de Paume en 1947 - Au musée d’Orsay en 1986.

Expositions

Paris, Grand Palais, 1910, Salon d'automne, n° 5 - Grenoble, musée de Grenoble, 1936, Centenaire de Fantin-Latour, n° 505 - Exposition itinérante dans le Midi de la France, mai 1956, Le paysage français de Poussin aux impressionnistes, n° 22 - Paris, musée Delacroix, Delacroix et l’impressionnisme, 1970 - Paris, musée Delacroix, 1975, Delacroix et les peintres de la nature [cité seulement] - Mont-de-Marsan, 1980, Le Second Empire dans les Landes, n° 23 (repr.) - Tokyo, musée d’Art occidental, 1982, Tendances du réalisme en France, n° 30 (repr.) - Berlin, Prague, 1982-1983, De Courbet à Cézanne, n° 6, repr. p. 47 - Los Angeles, Chicago, Paris, 1984-1985, L’Impressionnisme et le paysage français, n° 8, repr. coul. p. 57 - Montpellier, New York, 1992-1993, n° 38, repr. p. 133 - Toulon, musée de Toulon, 1992-1993, Le paysage provençal et l'école de Marseille avant l'impressionnisme, pl. 168, repr. p. 149 - Sarrebruck, Saarbrucken Museum, 2001, p. 160 (repr.) - Le Caire, musée national Khalil, 1998, n° 11, p. 60, repr. p. 269 - Lyon, musée des Beaux-Arts, 2002, L'école de Barbizon, peindre en plein air avant l'impressionnisme, n° 11, repr. p. 269 - Ravenne, Loggetta Lombardesca, 2003, repr. p. 210 - Vitoria-Gasteiz, Sala Fundacion Caja Vital Kutxa, 2005, Las Escuelas de Barbizon y de Olot, pp. 24-25 (repr.) - Washington, National Gallery, 2008, n° 16, p. 180 (repr.) - Padoue, Palazzo Zabarella, 2009-2010, Telemaco Signorini e la pintura in Europa, n° 5 (repr.) - Sao Paulo, Rio de Janeiro, Madrid, 2012-2013, Impressionismo. Paris e la modernidade. Obras-primas Musée d'Orsay, cat. 49, p. 61 (repr.) - Rome, Complesso del Vittoriano, 2014, Musée d'Orsay Capolavori, n° 10, p. 66 (repr.) - Montpellier, Paris, Washington, 2016-2017, cat. 23, repr. p. 229 et p. 61 [Les références sont du catalogue en français].

Bibliographie

Bénédite, Catalogue des peintures de l'Ecole française du musée du Luxembourg, 1924, n° 23, p. 226 - Charensol, L'Amour de l'Art, janvier 1927, pp. 26, 28 - Masson, Catalogue des peintures, sculptures et miniatures du musée du Luxembourg, 1927, p. 12 [Sous le titre La Garrigue] - Poulain, L'Eclair du Midi, 1er nov. 1926 - Poulain, Formes, nov. 1931, n° 19 - Poulain, Bazille et ses amis, 1932, n° 9, pp. 53, 56, 212 - Scheyer, Art Quarterly, 1942, p. 120 - Drucker, Arts, 16 mai 1947 - Catalogue du musée de l’impressionnisme, 1947, n° 22 [Sous le titre La Garrigue] - Daulte, Bazille et son temps, 1952, n° 11, pp. 110, 170-171 [Thèse sous la direction de Gaston Poulain] - Adhémar, Sterling, Musée national du Louvre. Peintures, 1958, n° 41, t. I, repr. pl. XIII - Catalogue impressionnistes, musée du Louvre, 1959, n° 3 - Adhémar, Dayez, 1973, Musée du Luxembourg-Jeu de Paume, pp. 8, 139 (repr.)  - Adhémar, Distel, Catalogue du musée du Jeu de Paume, 1977, repr. p. 12 - Gache-Patin, Lassaigne, Sisley, 1983, p. 55, repr. p. 64 - Adhémar, Dayez, Musée du Jeu de Paume, 1983, p. 151, repr. p. 12 - Compin, Roquebert, 1986, Catalogue sommaire des peintures du musée d'Orsay, repr. p. 49 - Patin, 1986, A la campagne, n° 17 (repr.) - Rosenblum, 1989, Les peintures du musée d'Orsay, repr. p. 225 - Compin, Lacambre, 1990, Catalogue sommaire illustré des peintures du musée d'Orsay, t. 1, repr. p. 46 - Daulte, Frédéric Bazille : Catalogue raisonné de l'œuvre peint, 1992, n° 11, p. 38 (repr. coul.) et p. 157 [Réédition de 1952 avec photos en couleur] - Jourdan, Vuatone, Cat. exp. Montpellier, New York, 1992-1993, n° 38, repr. p. 133 - Bajou, Frédéric Bazille, 1993, n° 35, repr. p. 79 (repr.) - Parinaud, Barbizon. Les origines de l'impressionnisme, 1994, p. 80 - Schulman, Frédéric Bazille : Catalogue raisonné, 1995, n° 13, repr. p. 120 - Pitman, Bazille : Purity, Pose and Painting in the 1860s, 1998, p. 251, note 30 - Pomarède, Cat. exp. Lyon, musée des Beaux-Arts, 2002, L'école de Barbizon, peindre en plein air avant l'impressionnisme, n° 11, repr. p. 269 - Hilaire, Jones, Perrin, Cat. exp. Montpellier, Paris, Washington, 2016-2017, cat. 23, repr. p. 229 et p. 61 [Les références sont du catalogue en français] - Schulman, Frédéric Bazille : Catalogue raisonné numérique, 2022, n° 13.

Le 4 mai 1865, Monet, insistant, écrit à nouveau à Bazille pour lui demander de venir à Chailly : « Vous perdez votre temps à Paris; ici tout est superbe, vous devriez profiter des beaux jours » Bazille s’est-il réellement rendu à Chailly, au printemps de 1865, à l’incitation de Monet ? Aucune information précise ne figure dans sa correspondance. Dans une lettre à son père du 17 juillet, il écrit : « Il me faut encore une dizaine de jours pour finir les peintures commencées, après quoi je dois aller passer cinq ou six jours à Chailly pour rendre service à Monet, il fait un grand tableau dans lequel je dois figurer, et il a besoin de ce temps pour me peindre ». Ce sera le Déjeuner sur l’herbe. Ce n’est que le 19 août qu’il arrive finalement à Chailly; il l’annonce à son père dans une lettre du 24 août.

On s’étonnera qu’en une quinzaine de jours il ait eu le temps de peindre tous les tableaux attribués à cette période. Peut-être ce séjour à Chailly, en août-septembre 1865, a-t-il été précédé, cette même année, par d’autres dont sa correspondance ne témoigne pas, sa correspondance étant plus que lacunaire à cet égard.

Bazille a peint un coin de forêt avec, au premier plan, un chemin, des broussailles et, au second, de petits rochers, ilots de lumière entourés d’arbres sombres et denses. De toute évidence, il a peint sur le motif et a voulu rendre une atmosphère douce et agréable. La lumière est cachée par les arbres qui se détachent sur un ciel d’un blanc laiteux. Tout est immobile. De rares rochers, par quelques taches rosées ou bleutées, viennent ponctuer ce paysage qui s’apparente à la tradition paysagiste du XIXe siècle.

En 1865, les principaux paysagistes français connaissent Fontainebleau, soit qu’ils y aient séjourné, comme Rousseau, Diaz ou Millet, soit qu’ils y soient passés, comme Courbet, Monet, Sisley, Renoir, Cézanne et bien sûr Bazille, pour ne citer que les plus connus. Sur la Forêt de Fontainebleau convergent plusieurs influences, ce qui fera dire à Charensol que « la technique de Rousseau, de Français et d’autres peintres de Barbizon, a beaucoup séduit [Bazille] quand il peignait en 1862-1863 sa Lisière de forêt » [Charensol, dont nous n'acceptons pas la datation, L'Amour de l'Art, 1927, n° 1, p. 28].

Parmi ces influences, il faut mentionner d’abord celle de Courbet. On sait que Bazille fît sa connaissance en 1863 par l’intermédiaire de son ami Fajon. Dès son enfance, il avait eu l’occasion de le découvrir et d’admirer son talent dans la collection Bruyas.

« L’influence de Courbet a-t-elle [...] son origine dans la visite de celui-ci (et de Corot) à Monet blessé ? », se demande Rewald [Rewald, The History of Impressionism, The Museum of Modern Art, New York, 1946, p. 102]. Quoi qu’il en soit, Bazille travaille comme Courbet et joue sur les effets de la matière. Ici, le paysage reste encore sombre, trop sombre pour donner à plein cet effet qui triomphera dans le Paysage à Chailly, où l’impact de la lumière sur la matière jouera pleinement son rôle. A Diaz, qu’il connut sans doute grâce à Renoir, il doit cette clairière opaque d’où n’émergent que des taches de lumière mais celle-ci, comme le dit Daulte, « ne ruisselle pas »; elle est au contraire discrètement appliquée.

C’est en fait de la technique de Théodore Rousseau que se rapproche le plus ce tableau. Il lui prend ce mélange de tons, ces verts et ces marrons qui rendent parfois indistincts les premiers plans.

Il lui reprend aussi la sensibilité des feuillages des arbres, dont la cime, brossée par petites touches, laisse passer une lumière tamisée. Bazille était grand admirateur de Rousseau. Dans une lettre du 27 avril 1869 à son cousin Louis Bazille, il écrit : « J’admire autant que tout Delacroix, j’aime beaucoup Ingres, Corot, Rousseau, Millet, souvent Courbet ».

Poulain conclut de façon bien sévère à notre avis son commentaire sur la Forêt de Fontainebleau et le Paysage à Chailly : « Pas plus que les brumes dorées de la côte normande, ce ne sera le printanier aspect des opaques fourrés de Fontainebleau qui révèlera Bazille à lui-même » [Poulain, 1932, pp. 53-54]. Certes, la Forêt de Fontainebleau paraît encore bien sage, mais elle ouvre techniquement la voie au Paysage à Chailly où s’exprimera toute l’originalité du peintre.